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Séance publique au Senat

OCTOBRE 2011 :

l’Aisne va peut-être devoir mettre la main au porte-monnaie :

Le sénateur Antoine Lefèvre a interrogé, en séance publique, le ministre Nathalie Kosciusko-Morizet sur le nouveau périmètre des grands lacs de Seine. Ce dernier prévoit de soumettre de nouveaux départements à contribution pour ses dépenses d’exploitation, d’entretien et d’aménagement et 24 communes de l’Aisne seraient concernées. 160 millions d’euros seront nécessaires ces dix prochaines années pour l’exploitation courante, mais aussi et surtout pour les opérations pluriannuelles de réhabilitation. « Ce serait ainsi 50 centimes d’euros le mètre cube d’eau consommé demandé en plus aux habitants de toutes les communes traversées par les rivières concernées », dénonce le maire de Laon.

Source :

Extrait de la scéance publique du Sénat du 11 octobre 2011 :

Mme la présidente :
La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 1378, adressée à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

M. Antoine Lefèvre :
Certaines communes du sud de l’Aisne sont, décidément, dans l’oeil du cyclone ! Après la menace, maintenant endiguée, d’une exploitation d’huile de schiste par fracturation hydraulique, mais aussi après le nouveau plan de circulation des avions sur Roissy, arrive aujourd’hui le nouveau périmètre des grands lacs de Seine, sujet de ma question.

L’établissement public territorial de bassin, l’EPTB, « Seine Grands Lacs » projette de soumettre de nouveaux départements à contribution pour ses dépenses d’exploitation, d’entretien et d’aménagement. Le nouveau périmètre de cet établissement, pris par arrêté préfectoral de la région de l’Île-de-France, le 7 février dernier, inclut dorénavant quatre régions, soit treize départements, dont l’Aisne, et vingt-quatre communes situées dans son sud. Cet établissement public, qui gère les quatre lacs réservoirs – Pannecière, Seine, Marne et Aube – régulant le débit de la Seine, demande aux communes bénéficiaires du service rendu par le soutien d’étiage de participer aux frais de rénovation desdits ouvrages. Ce sont donc près de 160 millions d’euros qui seront nécessaires ces dix prochaines années non seulement pour l’exploitation courante, mais aussi et surtout pour les opérations pluriannuelles de réhabilitation. Ce serait ainsi cinquante centimes d’euros le mètre cube d’eau consommé demandé en plus aux habitants de toutes les communes traversées par les rivières concernées.

Une enquête publique a été menée cet été, mais assez rondement, puisque sa durée a été, non pas d’un mois, mais de vingt-cinq jours, et cela en juillet, c’est-à-dire à une période pendant laquelle nombre de nos concitoyens sont absents.

Enfin, il est à craindre que les factures d’eau potable des habitants soient en augmentation du fait d’une possible répercussion.

Cette enquête publique devant déclarer d’un intérêt général permettant la création de cette redevance soulève un avis défavorable de l’ensemble des communes concernées, toutes tendances confondues. Elles dénoncent la méthode et le manque de concertation. Que dis-je ? La non-concertation avec les élus et les entreprises avant la mise en oeuvre de la procédure !

Il a été demandé un avis des maires, sans consultation de leurs organes délibérants... Quid de la démocratie ?

Sur le plan technique, les communes contestent les critères ayant permis de délimiter le périmètre concerné et de fixer la durée de la période d’étiage pour le calcul de la redevance.

Les contribuables axonais ne voient pas pourquoi ils seraient appelés à payer pour l’entretien d’ouvrages dont la fonction première est d’éviter les crues en région parisienne et d’effectuer des prélèvements pour son alimentation en eau potable. Le prix de l’eau à Paris est d’ailleurs l’un des moins cher de France, 2,92 euros TTC du mètre cube, alors que certaines des communes concernées dans mon département affichent déjà un prix de près de 7 euros ! Et que dire si le coût de cette taxe s’envole ?

Et pourquoi pas, à l’avenir, une nouvelle taxe sur la prévention des inondations ou encore une contribution au fonctionnement de cet établissement public auquel elles ont été intégrées de force ? C’est tout simplement un impôt déguisé !

Enfin, et surtout, tout cela est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales, qui interdit à une collectivité de lever des impôts sur les citoyens qui ne relèvent pas de son territoire.

Comment comprendre que le préfet d’Île-de-France puisse élargir le périmètre d’intervention de l’établissement public à des collectivités locales qui ne font pas partie de son conseil d’administration, composé de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne ? En effet, je ne suis pas persuadé que les Parisiens et les Franciliens accepteraient de payer pour les réseaux de fourniture d’eau potable des communes de l’Aisne ou encore que ces dernières décident du prix des parkings à Paris, comme l’a récemment évoqué l’un de mes collègues de l’Assemblée nationale !

Monsieur le secrétaire d’État, avec les élus de l’Aisne, je vous interroge à la fois sur l’objet et la méthode.

Mme la présidente:
La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, qui m’a chargé de vous répondre.

L’institution interdépartementale des barrages-réservoirs du bassin de la Seine, l’IIBRBS, gère quatre réservoirs qui sont situés sur la Marne, la Seine, l’Yonne et l’Aube. Totalisant un volume de stockage de 830 millions de mètres cubes, ils sont destinés tant au soutien de l’étiage qu’à l’écrêtement des crues.

Pendant la période d’étiage, de juin à novembre, les apports des lacs représentent en moyenne plus de 60 mètres cubes par seconde, soit près de 30 % du débit observé à Paris et 50 % sur la Marne. Pendant une année sèche, les apports des quatre ouvrages représenteraient plus de 60 % du débit observé à Paris. L’importance de ces ouvrages pour l’alimentation en eau des territoires concernés est donc incontestable.

Comme vous le soulignez, des engagements financiers importants seront nécessaires au cours des prochaines années pour réhabiliter et maintenir en état ces ouvrages réalisés entre 1949 et 1980 et garantir la protection contre les inondations et la ressource en eau des populations et des activités économiques en aval.

Les collectivités membres de l’institution n’ont pas souhaité assumer seules ces dépenses. L’IIBRBS se devait donc de dégager des recettes nouvelles. À sa demande, une enquête publique a été réalisée sur le projet de déclaration d’intérêt général de ces ouvrages, en application de l’article L. 211-7 du code de l’environnement. Dans l’hypothèse où cette déclaration serait prononcée, l’institution pourra recouvrer une redevance pour service rendu auprès des personnes bénéficiaires du soutien d’étiage.

Il ne s’agit pas d’une démarche spécifique au bassin de la Seine. Une telle redevance est d’ores et déjà perçue par l’établissement public Loire pour le soutien des étiages de l’Allier et de la Loire par les ouvrages de Naussac et de Villerest.

Cette contribution des usagers de l’eau au fonctionnement des ouvrages de soutien d’étiage ne pourra concerner que les seules dépenses relatives au soutien d’étiage. La redevance est assise sur les volumes d’eau prélevés sur les axes soutenus par les ouvrages de l’institution, à savoir la Seine, la Marne, l’Aube et l’Yonne. La rivière Aisne ne fait pas partie du territoire de l’EPTB Seine.

Par ailleurs, les dépenses de prévention des inondations représentent globalement la moitié des dépenses d’exploitation et de réhabilitation des ouvrages gérés par l’institution. Mme la ministre de l’écologie vous assure, monsieur le sénateur, que ces dépenses ne pourront en aucun cas être financées par la redevance perçue au titre du soutien d’étiage. Par ailleurs, l’État a déjà assuré l’institution de son appui, par le biais d’une subvention pour les travaux d’aménagement des ouvrages nécessaires au titre de la gestion des crues.

L’élargissement du financement de l’institution pose en fait la question de l’association à sa gouvernance des diverses parties concernées. D’ores et déjà, un comité consultatif a été créé par l’institution, associant l’ensemble des acteurs du territoire de l’établissement, dont le conseil général de l’Aisne, pour définir les actions à entreprendre au titre de sa compétence d’établissement public territorial de bassin. Mme la ministre souhaite à cet égard que l’institution poursuive les réflexions déjà engagées sur la modification de ses statuts.

Mme la présidente :
La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre :
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des précisions que vous venez d’apporter. Malgré tout, je reste quelque peu sur ma faim, car votre réponse était technique.

Quoi qu’il en soit, je conteste la mise en oeuvre de cette nouvelle contribution et j’entends demeurer très vigilant sur les suites de ce dossier, qui aura des conséquences sur les habitants et les collectivités du sud du département de l’Aisne.

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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